UNE EXPÉRIENCE, UN TÉMOIGNAGE
Par Olivier PERON • 25 avril 2018
« La vision sans l’action n’est qu’un rêve; et l’action sans vision est vaine et ennuyeuse. » Robert Dilts
Dans un précédent article, consacré au coaching professionnel, j’avais évoqué la filiation du coaching professionnel avec la préparation mentale des sportifs. Et je vais ici concentrer mon propos sur cette question spécifique de la préparation mentale. Je l’aborde par le biais du témoignage. Je vais ici relater l’expérience d’un exercice que j’ai vécu comme « coaché ». Et comment cet exercice m’a permis d’améliorer mon swing de golf en particulier et mon jeu de golf en général. Parce que, oui, je joue au golf.
LE GOLF ET MOI
J’ai vraiment découvert et appris à jouer au golf en 2010, après quelques séances découvertes dans différents golfs. Je dois à Thierry Mathon, pro de golf, de m’avoir appris et fait aimer ce sport, et qui m’a encouragé dans la rédaction de cet article. Cette pratique m’a permis de renouer avec un passé sportif que j’avais mis en sommeil du fait d’activités pro et extra-professionnelles.
La pratique du golf demande patience et temps : entre les heures de cours nécessaires à l’apprentissage et à la progression, les heures de practice pour assimiler ce mouvement non naturel appelé swing de golf, et enfin les heures passées sur les fairways, à arpenter les parcours. Parce que le plaisir réside finalement, là, sur le parcours, où tous les efforts réalisés précédemment doivent converger, se cristalliser vers le plaisir du jeu. Et pour certains et certaines, le plaisir de la compétition, pour se mesurer aux parcours, aux co-compétiteurs, mais avant tout et surtout, se mesurer à soi-même.
“Le golf se joue surtout sur un parcours de 25 cm, l’espace entre vos oreilles.” Bobby Jones
La pratique du golf m’a permis de retrouver un esprit de compétition qui m’avait animé dans mes jeunes années. Et qui dit compétition, dit objectif et dit préparation. Et la première préparation est technique et physique.
J’ai aujourd’hui un niveau légèrement au-dessus du niveau médian (index de 28, donné, pour ceux que cela intéresse).
L’index permet de mesurer le niveau de jeu au cours de compétitions ou parties officielles dans lesquelles le score est contrôlé et enregistré par la Fédération Française de Golf. Secrètement, j’ai un objectif de niveau de jeu que je souhaite atteindre. Et c’est sur ce niveau souhaité que j’ai travaillé, et sur lequel a porté l’exercice de préparation mentale que je vais vous décrire.
NIVEAUX DE CONSCIENCE OU NIVEAUX LOGIQUES
Au cours de ma certification en coaching, nous avions de nombreux exercices, en binôme, où nous alternions les rôles du coach et du coaché. L’intérêt, pour éprouver pleinement l’exercice, est d’avoir une vraie demande. Au cours d’une matinée, j’avais décidé de tester un outil avec une demande liée à ma pratique sportive. Il s’agissait des niveaux de conscience de Bateson ou niveaux logiques de Dilts. Gregory Bateson ayant élaboré la version théorique à partir de laquelle Robert Dilts a construit l’outil pratique. Dans une série de trois articles, Robert Dilts le décrit parfaitement.
Dans le premier, il présente les travaux de Bateson, dans le second il décrit le passage de la théorie à la pratique, et dans le troisième, il approfondit en faisant le lien entre les niveaux logiques et le système nerveux. (je conseille la lecture du second, s’il ne devait y en avoir qu’un seul à lire).
Un outil est, en général, ce qui permet de faire un travail. En améliorant l’efficacité ou en rendant possible certaines actions. En coaching, les outils, permettent d’améliorer et de structurer le questionnement. Les niveaux logiques vont avoir plusieurs fonctions, au moment où le coach choisit de les utiliser. C’est un outil de diagnostic, c’est un outil de structuration et c’est un outil de renforcement. Il aide à clarifier l’objectif, il en vérifie la congruence et il améliore la conscience de soi. Très utile quant aux nombreuses situations qu’il peut aider à éclaircir et à poursuivre, il peut être utilisé dans de nombreuses situations d’accompagnement.
D’un point de vue concret et pratique, Robert Dilts a proposé une structuration et une division du questionnement divisé en six champs distincts. Et ordonnés de telle manière, où chaque champ va interagir avec le précédent :
L’environnement : Où êtes-vous ? où vivez-vous ?
Le comportement : Que faites-vous ? Comment se passe ces moments ?
Les capacités : De quoi êtes-vous capable ? Quelles compétences mettez-vous en œuvre ?
Les croyances et valeurs : Qu’est-ce qui est important ? Qu’est-ce que cela vous apporte ?
L’identité : Comment vous décrivez-vous ? Qui êtes-vous ?
Le sens : Quel sens donnez vous à votre action ? A quel groupe vous sentez-vous appartenir ?
Pour passer à l’aspect pratique, je vais maintenant vous décrire l’exercice tel que je l’ai vécu, en illustrer le fonctionnement, le déroulé, avant de revenir ensuite sur les apports et les bénéfices de cet exercice.
LE DÉROULÉ DE L’EXERCICE
Debout, devant six feuilles placées au sol. Sur chacune d’entre elles, un mot est inscrit, correspondant aux champs cités précédemment. Le collègue (élève-coach) à mes côtés. L’exercice démarre. Première question.
- Quel est ton objectif ?
- Avoir un index à 18, être capable de jouer, en moyenne, un coup au-dessus du par.
- Avance sur la première case. Ton objectif est atteint. Tu as un index à 18. Où te vois-tu à ce moment-là ?
- Décris-moi où tu es ?
- Je me vois à l’étape d’après. A la compétition suivante. J’arrive au golf. Le matin. L’endroit est calme, un peu frais. J’arrive 1h avant le départ prévu, j’ai récupéré ma carte de score, pris un café. Je suis au putting-green et commence mon échauffement.
- Avance sur la case suivante, « comportement ». Tu es l’échauffement. Comment se déroule cet échauffement ?
- Que fais-tu ?
- Je commence doucement par un éveil articulaire et musculaire. Et puis au putting, et puis s’entrainer sur différents coups de golf, les approches, les fers, les bois. Insister sur le rythme, plus que sur la puissance. Et puis revenir au putting avant de rejoindre le départ.
- Avance encore. Au moment du départ de quoi te sens tu capable ?
- Au moment du départ. L’objectif du jour, comme toutes les parties, est de se faire confiance, de prendre du plaisir, dans un cadre agréable. L’échauffement m’a montré que je suis dans de bonnes dispositions, les sensations sont bonnes. Je me sens prêt à jouer une belle partie, de réaliser de jolis coups et faire quelques bons scores.
- Tu viens de jouer ton départ. Tu as réussi un beau coup de golf. Avance à nouveau.
- Qu’est ce qui est important pour toi à ce moment-là ?
- Ça va être de rester concentré, de rester calme, de bien effectuer ma routine avant chaque coup. Effectuer un coup d’essai. Alignement, grip, posture. Rester focus sur mon rythme. Et de maintenir cela pendant environ les quatre heures que durent une partie. La patience, la constance, la persévérance sont importantes.
- Cela fait plus de deux heures que tu es sur le parcours. Comment ça va ?
- Comment ça se passe ? avance une dernière fois, et décris-moi qui tu es à ce moment-là.
- Depuis le départ, il y a eu de bons moments, d’autres moins bons. J’ai pu les gérer grâce à la routine, et à me remettre dans le coup suivant, sans être trop perturbé. Je suis content de ce qui s’est mis en place. Je me sens bien. Il reste encore sept trous à jouer. Content de jouer au golf, et de pouvoir, au vu des résultats et de mon attitude, me sentir pleinement golfeur.
- Peux-tu maintenant, sur cette dernière case, me dire le sens que tu mets derrière cet objectif ?
- Avec cette envie de jeu, cette rigueur mise en place, c’est de renouer avec la compétition sportive. Compétition que je pouvais faire plus jeune contre les autres, aujourd’hui je la mène contre le parcours, et contre moi-même. Pour gagner, ou pour apprendre. Je ne perds plus, c’est la grande et bonne nouvelle.
Voilà en résumé, un exercice qui se déroule idéalement sur une durée de trois quarts d’heure. Et après être allé de « l’environnement » au « sens », le parcours se fait étape par étape, en résumant, reformulant ce qui a été dit à la montée. Ce retour permet de valider et d’ancrer ce qui a été exprimé. Et de revenir, ici et maintenant, et vérifier que tout est ok pour le coaché. Et bien évidemment conclure la séance. Comment je peux mesurer les apports et les bénéfices de cet exercice ?
BÉNÉFICES ET APPORTS
Cet exercice des niveaux logiques m’a permis de me discipliner notamment pour l’échauffement. La routine est aussi devenue naturelle dans le déroulé de mon jeu. Cet exercice m’a permis, à partir d’un objectif fixé, de tracer un chemin pour y parvenir, qui passe par une attitude en cours de jeu, et un plan d’entrainement (physique et technique). Le corollaire d’une routine régulière, c’est la gestion des émotions sur le parcours. Célébrer les jolis coups, mais ne pas s’enflammer, et ne pas se flageller pour un coup raté.
Le résultat est aussi une attitude plus calme, plus sereine, qui prend moins d’énergie. La concentration se fait sur le processus. Je prends donc plus de plaisir qu’avant à jouer. C’est mieux pour moi (et pour mes partenaires).
J’ai réalisé cet exercice en septembre 2016. Et je m’en souviens encore parfaitement. Cela me permet de pouvoir le revivre quand je le pense nécessaire, quand je commence à ne plus être aussi rigoureux et concentré, cela me permet de revenir à l’essentiel, aux fondamentaux de ce jeu. Cela apporte aussi responsabilisation et autonomie. La poursuite de mon objectif ne dépend que de moi.
L’objectif fixé au départ n’est pas encore atteint, mais je suis sur ce chemin, et aujourd’hui c’est là l’essentiel. Mon jeu a progressé. Je le mesure aves quelques indicateurs. Être sur ce chemin, me permet de progresser dans mon jeu et dans mon attitude, de prendre plus de plaisir dans le jeu. What else ?
LA PRÉPARATION MENTALE EST-ELLE ACCESSIBLE À TOUTES ET TOUS ?
L’exercice décrit ci-dessus est transposable à d’autres objectifs dans le même sport. Il est transposable à d’autres disciplines sportives. Quelques soit son objectif, quelque soit niveau de pratique, il peut être utilisé pour vérifier la cohérence de l’objectif. Il constitue une première marche, une première étape dans un processus plus long de préparation mentale. Je dis ici plus long, car s’attachant à différentes phases d’une pratique sportive, pour préparer l’ensemble d’une saison, une période particulière ou encore un aspect précis du jeu ou de la discipline.
« La préparation mentale est un entraînement qui consiste à développer les habiletés mentales et cognitives dans l’objectif d’optimiser la performance personnelle (ou collective) du (des) sportif(s) tout en favorisant le plaisir de la pratique et l’autonomie », telle qu’elle était définie dans L’Equipe.
Et j’entends personnellement la performance au sens de la réalisation de soi, de la réalisation de son potentiel et non pas au sens d’un toujours plus qui peut amener des dérives de surentrainement ou de dopage.
Il existe plusieurs disciplines, et ce n’est pas exhaustif, pour aborder la préparation mentale : le coaching, la psychologie, la sophrologie ou encore l’hypnose, qui déploient autant de techniques qui vont mettre en œuvre différents outils pour aider à l’atteinte de ses objectifs. Il n’existe pas de solution miracle en la matière. Il n’existe pas une solution unique. C’est très souvent un mix de plusieurs techniques répondant à différentes personnalités qui vont permettre à chacun de trouver ses recettes; pour aussi gérer les différents moments dans une saison, pour fixer les objectifs à court, moyen ou long terme.
La préparation mentale est complémentaire de la préparation technique et physique. La préparation mentale n’évite pas les heures d’entrainement, elle va les optimiser en leur donnant du sens. Elle ne garantit pas le succès, mais elle y prépare. Elle permet également de relativiser les échecs. Elle assure de prendre le recul nécessaire pour une bonne pratique de son sport.
Elle ne nécessite pas nécessairement un suivi long et régulier, et une à trois séances peuvent permettre de clarifier, fixer un objectif et définir une feuille de route pour la saison à venir, ou pour la prochaine compétition. Au travers de cette expérience et de ce témoignage, je souhaitais montrer que la préparation mentale n’était pas réservée à une catégorie d’athlètes et était accessible à toutes tous, pour prendre du plaisir quelque soit son niveau de pratique.
“Le défi du golf, c’est d’accepter d’être imparfait.” Jack Nicklaus
UNE DÉFINITION, UNE APPROCHE
Par Olivier PERON • 20 mai 2017
Avant d’aborder le coaching professionnel, évoquons d’abord le coaching, en essayant d’en dessiner les contours au travers de sa courte histoire. Le coaching est en effet une discipline récente et une discipline transversale des sciences humaines. Le coaching est à la croisée de diverses disciplines dont les plus importantes sont la psychologie, la sociologie des organisations, l’approche systémique, la psychologie sociale, la psychanalyse et la philosophie. Le coaching a un caractère très pragmatique, basé sur l’accompagnement de l’individu ou des équipes, avec la préoccupation permanente de l’autonomisation, de la responsabilisation et de la mise en action. Le coaching développe le potentiel d’une personne à maximiser ses propres performances. Thimothy Gallwey
Il existe un curieux paradoxe : quand je m’accepte tel que je suis, alors je peux changer. Carl Rogers
J’écarte pour cet article, les origines antiques et les origines étymologiques du mot coaching qui constituent un vrai sujet d’étude et de réflexion. Je situe donc l’origine moderne du coaching aux années 60-70, sur la côte Est des Etats-Unis. Et cette origine moderne, nous la devons à Thimothey Gallwey. Né en 1938, il était capitaine de l’équipe de tennis de l’Université d’Harvard dans les années 1960. En 1974, il publie un ouvrage de référence, « The Inner Game of Tennis », qui pose les bases du coaching tel que nous pouvons le connaitre et le décrire aujourd’hui. Dans son cadre qui était la préparation mentale des sportifs, il a apporté aborde de nouvelles notions, telles que la libération du potentiel des joueurs, la connaissance de soi, l’accueil et la gestion des émotions, la notion d’apprendre à apprendre. Du milieu sportif, le coaching conserve la notion d’objectif (individuel, collectif, professionnel ou personnel), de performance.
Le coaching ne reste pas longtemps cantonné à la sphère sportive, Il se développe rapidement au sein des entreprises avec l’accompagnement notamment de leurs dirigeants. La notion d’accompagnement, qui est au cœur du processus de coaching est héritée, elle, des sciences humaines et notamment, pour n’en citer qu’un, des travaux de Carl Rogers (1902-1987). Psychologue, il a exercé dans les champs de la psychologie clinique, de la psychothérapie et a développé sa méthode appelée l’approche centrée sur la personne.
Elle s’appuie sur une hypothèse et trois principes.
L’hypothèse, c’est que l’individu possède les ressources pour se comprendre, se percevoir différemment, changer ses attitudes fondamentales et son comportement vis-à-vis de lui-même.
Les principes dépendent de l’accompagnant, du coach en ce qui nous concerne, et permettent à l’individu d’accéder à ses ressources. Les trois principes sont : l’authenticité, le regard positif inconditionnel et la compréhension empathique.
Le coaching professionnel, se construit et se développe, autour de ces deux notions tout à fait compatibles, complémentaires et essentielles au développement pérenne des individus et des organisations que sont la performance et l’humanisme.
Coaches : what they do, who they are. Frederic Hudson
Toujours aux Etats-Unis, en 1999, Frederic Hudson, dans The Handbook of Coaching porte un nouveau regard sur le métier de coach et ses champs d’intervention et pose de nouvelles bases théorique, pratique et éthique du métier de coach. Dans son ouvrage, il développe cinq idées principales :
- Un coach est un professionnel qui facilite l’apprentissage par l’expérience d’aptitudes utiles et de compétences transférables
- Le coach ne conseille pas, il ne répare pas et n’est pas dans le soin
- Face au changement permanent, dont l’intensité et les dimensions vont croissantes, le coach aide son client à faire les bons choix, quel que soit le contexte. Il apprend à apprendre.
- Les modèles de vie « linéaires » sont obsolètes, nous devons nous adapter à des cycles successifs
- La fonction du coach est d’accompagner les individus et les organisations à définir leurs objectifs et à les atteindre.
Encore plus aujourd’hui qu’il y a vingt ans, le monde change, il change vraiment et il change vite. Les phases de changement, de transition ne sont plus des exceptions, mais sont devenues la règle et la norme. Pour Hudson, le coach est un artisan du changement, un professionnel formé, préparé, pour accompagner les personnes et les organisations dans leurs évolutions.
Le coach professionnel se reconnait à sa formation, sa pratique, sa démarche, sa déontologie et sa posture. Déclaration EMCC-ICF-SFC
Dans le sens d’un développement cohérent et un souci de reconnaissance, les trois principales associations françaises de coaching professionnel, l’EMCC (European Mentoring and Coaching Council), la SFC (Société Française de Coaching et l’ICF (International Coach Federation), ont signé une déclaration commune, en 2012.
S’adressant à des professionnels, et traitant de problématiques issues du monde du travail, des entreprises et des organisations, le coach professionnel se doit : d’avoir suivi une formation spécifique, de souscrire à un code éthique et déontologique (respect de la confidentialité, respect des limites de compétences, établissement de contrats clairs), d’avoir une supervision régulière, de se former continuellement, d’accompagner ses clients en autonomie et respect du libre-arbitre.
L’ensemble de la déclaration est consultable à http://www.coach-pro.org/la-declaration.html.
Parmi les thématiques du coaching professionnel, sans être exhaustif, nous trouvons : gestion du stress, du temps, des conflits, la charge de travail, les urgences, se préparer à une prise de poste, la gestion de carrière, développer son leadership, ses compétences managériales, accompagner la constitution d’une nouvelle équipe, améliorer la cohésion des équipes, accompagner les mobilités, les réorganisations, préparer la transition vers la retraite.
Décider de faire appel à un coach, de choisir un coach, ne sont pas des démarches courantes, et nécessairement évidentes pour chacun et chacune. Le respect de cette déclaration offre une garantie de professionnalisme, de compétences aux clients et bénéficiaires du coaching. Faire ce choix, c’est offrir cette garantie, effectivement. C’est aussi pour moi avoir une exigence pour ce métier et une ambition sans cesse renouvelée, en tant qu’artisan, de le pratiquer dans les règles de l’art.